"Envoyé Spécial", hier soir sur France 2 : Les scandales de l’avortement

Publié le par Juliette

IVG2.jpgBon, certes, un sujet sur l’avortement n’est pas forcément des plus appropriés pour une femme dans son huitième mois de grossesse mais ce deuxième enfant choisi, voulu, assumé ne diminue en rien ma solidarité envers les femmes qui se retrouvent piégée par une fécondation non désirée. J’ai toujours été « pour » le droit à l’avortement (personne n’est « pour » l’avortement en soi, qui reste une épreuve dans la vie d’une femme) tout en étant persuadée que si j’étais un jour rattrapée par une grossesse accidentelle, je ne pourrais me résoudre à renoncer à la vie que je sentais en moi. Pourtant, le jour où ça m’est arrivé (comme dans la vie d’une femme sur deux), dans des circonstances quasi impossibles (rupture de préservatif + conception hors période de fécondité + échec de la pilule RU), la question ne se posait plus : c’était lui ou moi. Comme le rappelait encore un des médecins hier soir : l’avortement à toujours existé et quand une femme veut avorter, elle trouve le moyen de le faire, fus-ce au péril de sa vie. « On ne fait pas un enfant, on fonde une famille » m’avait dit fort justement un autre médecin à l’époque (tout en profitant de ma vulnérabilité au moment de l’échographie pour me demander si je changeais d’avis). Le pire départ pour un enfant dans la vie, c’est de ne pas être désiré.
J’ai surtout retenu de cette expérience, qu’il ne fallait surtout pas traverser cette épreuve seule, alors qu’on tend justement à n’en parler à personne, à assumer l’intervention dans le silence, la solitude et la honte, face à un personnel médical qui vous laisse livrée à vous même.
J’ignorais cependant que ce droit acquis depuis plus de 30 ans, n’était en fait qu’une tolérance et que l’avortement relevait aujourd’hui du saut d’obstacle.
J’ai ainsi appris hier soir (entre autres scandales) que : 
- l’avortement est le seul acte chirurgical que les médecins peuvent refuser en arguant d’une « clause de conscience » qui date de plus de 30 ans,
- la plupart des médecins refusent ainsi de pratiquer un acte qui n’a rien de valorisant et les listes d’attentes des hôpitaux sont telles que de nombreuses femmes n’obtiennent pas de rendez-vous dans le délai légal de 14 semaines (quasiment jamais appliqué dans les faits),
- l’avortement thérapeutique pour malformation congénitale au-delà de ce délai est refusé une fois sur deux (je pensais moi que c’était une formalité).   
 

IVGmanif-1970.jpgEn gros, si vous ne remarquez pas que vous êtes enceinte dès le premier retard de règles et que vous ne réagissez pas tout de suite, compte tenu des différents rendez-vous obligatoires pour vérifier que vous êtes bien sûre sûre de vouloir cet IVG (on va pas non plus vous faciliter la tâche, hein, z’aviez qu’à faire attention), vous avez de fortes chances de louper le coche et d’être contrainte d’avorter à l’étranger… pour peu que vous en ayez les moyens (le fait que certains pays autorisent l’avortement jusqu’à 8 mois de grossesse – par un léger détournement de la loi – est un autre scandale qui relève à mon sens de l’homicide mais n’enlève rien à la pertinence du présent débat). Dire que le remboursement de l’IVG devait justement rétablir une certaine équité entre les femmes, on est loin de l’esprit de la loi Weil.

La tentation peut être grande de se dire « ben si ça peut faire réfléchir les femmes et reculer le nombre d’avortements, c’est pas plus mal ». Seulement voilà, la France compte toujours 200 000 avortements par an, dont deux tiers sont dus à des échecs de contraception, ce qui met en lumière les lacunes du système en matière de prévention et d’information. Les pays qui ont jugulé le nombre d’avortements ne sont pas ceux dont la loi est la plus restrictive, mais ceux qui ont su mettre en place une politique d’information et d’éducation sur la contraception dès le plus jeune âge. Trop de femmes ignorent encore que « se retirer » n’est pas une technique de contraception fiable, que le préservatif présente un taux d’échec de 5 à 15% et que même la pilule n’est pas sûre à 100%. Il suffit d’une fois pour tomber enceinte, à croire que certains corps échappent à la conscience et sautent sur la moindre occasion pour engendrer. Hormis l’abstinence, l’adoption d’une méthode contraceptive médicale reste le seul moyen de contraception digne de ce nom. Toute autre stratégie pour échapper à l’ovulation revient à lire le moment opportun d’un rapport sexuel dans une boule de cristal. Mais, encore une fois, comment s’étonner du flou dans lequel restent les femmes quand on apprend – toujours hier soir, et c’est peut-être l’information la plus scandaleuse – que le personnel médical bénéficie d’une seule heure de formation à la contraception et à l’avortement en sept ans d’études de médecine ?

Publié dans Home - sweet Home

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T
<br /> Bonjour je trouve abérant de parler de tel sujet!! Pffff j'ai même pas de mots pour decrir ceci nous n'avons vraiment pas besoin de sa!! Anti ivg ok mais fermé la ok?! Ah oui c sur qu'une fille<br /> de 14 ans est apte a avoir un enfant!!!!!! Sa me met hors de moi, au lieu de nous apporté du soutient la societe et meme les medias se mette a nous planter dans le dos!! REFLECHISSEZ AVANT DE<br /> FAIRE DE TEL SUJET, Pensez au mal que vous allé faire bordel!!!!!!<br />
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L
@Juliette. Merci pour ton message... Dans la mentalité judéo-chrétienne, on n'est jamais mieux puni que par soi-même non ? Je suis en analyse depuis 3 ans, j'ai réussi à grandir (un peu), et si je suis une inquiète du quotidien, je garde confiance en l'avenir !@phiconver. Savoir prendre ses responsabilités, c'est aussi parfois accepter ses limites. A 21 ans, je n'étais pas en mesure d'accueillir un enfant, n'ayant pas fait le travail nécessaire après une enfance et une adolescence douloureuse, dont je n'ai pas à me justifier. Vous avez l'air instruit, vous devez connaître les mécanismes de reproduction psychiques... Alors au nom de quoi campez-vous sur des positions rigides un peu absolutistes ? Le droit à l'IVG est parti de la réalité des femmes. Et c'est pour moi le socle sur lequel nous devons nous appuyer pour tenter d'aller à l'idéal. Et l'idéal, selon moi, c'est prévenir les grossesses non désirées et accompagner les femmes qui font le choix douloureux de recourir à une IVG sans jugement, à défaut de compréhension...
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J
A chacun ses convictions. Tous les arguments soutenant une conviction ou l'autre sont à double tranchants et ont un côté "pernicieux". Les anti-alaitement d'avant proclamaient "on est pas des animaux, tout de même !", les pro-allaitement d'aujourd'hui arguent "n'oublions pas que nous sommes des mammifères comme les autres !". Beaucoup de maladies sont créées par la nature, faut-il pour autant les accepter sans les combattre ? La science a aussi pour fonction de nous aider à corriger les erreurs de la nature, dont une grossesse non désirée. Et seule une femme confrontée à cette épreuve peut estimer si oui ou non c'est une solution. Pour moi, c'était la seule solution envisageable et je remercie Dieu, la science, la société de m'avoir donné la possibilité de reprendre mon destin en main, de créer les conditions pour fonder ultérieurement une famille harmonieuse, plutôt que de reproduire les névroses familiales en perpétuant le cercle pernicieux d'enfants incomplets, car non désirés. C'est peut-être dans cette conviction que nous nous opposons le plus, je considère  la possibilité de choisir d'avoir "un enfant quand je veux, si je veux" comme un des progrès fondamentaux de la société et non comme le premier pas vers l'eugénisme.
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P
A toutes fins utiles, je précise que les chiffres donnés dans mon "antithèse" sont ceux de l'INED, qui n'est pas, à ma connaissance, une institution "pro-life". Et je note également que le raisonnement selon lequel la nature procède à des avortements (ie les fausses couches) est particulièrement pernicieux : tous les êtres humains meurent, est-ce pour cela qu'il faut légaliser le crime ?Cela étant dit, je me garde évidemment de jeter la pierre à une femme en détresse, même si je suis sincèrement convaincu que l'avortement n'est JAMAIS une solution. Travaillons ensemble à créer les conditions d'un meilleur accueil de la vie.
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J
Je suis allée lire et j'en suis toute retournée, je ne peux pas croire que c'est un avortement (médicalisé, légal, normal, quoi !) que tu décris - du coup je n'ai même pas osé laissé de commentaire - en tout cas si c'est ainsi que tu l'as vécu, c'est un vrai traumatisme que tu décris, du genre qui laisse des traces (la preuve, tu n'as pu en parler que 14 ans plus tard... et dire que certains pensent que les femmes "utilisent" l'avortement comme un moyen de contraception). Ton témoignage me conforte dans la conviction que, confrontée à un IVG, il faut en parler et se faire accompagner ! As-tu pensé à en parler à un psy ? Une expérience aussi traumatisante et enfouie peut vraiment représenter un blocage... car médicalement, un curetage n'entraîne aucune séquelle. Mais parfois la honte, la sentiment de "péché" voire de "crime" peut être si forte, qu'on croit qu'on va être "punie" par Dieu ou par la nature le jour où l'on souhaite vraiment avoir un enfant... Il faut absolument se libérer de cette mentalité judéo-chrétienne (de telles pensées ont le pouvoir d'affecter la réalité). Je dirais même que le seul élément positif d'une grossesse non désirée c'est qu'elle nous donne une indication sur notre fertilité, au moins on sait qu'on PEUT être enceinte... Moi même, j'ai vécu une IVG y'a 30 ans, ce qui ne m'a pas empêché de tomber enceinte trois fois après 37 ans et à chaque fois au premier essai... Tu MERITES d'avoir un enfant et toi tu n'as QUE 35 ans, ton ventre et ton coeur son propres, tu as peut-être juste besoin de te "nettoyer" la tête pour y arriver (aussi pour le bien de l'enfant à venir, qui fait souvent rejaillir des psychoses non réglées). Bon courage !
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