Régime or not régime, that is (encore !) the Question
L’autre soir, le Grand Journal nous a sorti son premier marronnier de printemps : les régimes. Face à nous deux spécialistes, auteurs de best-sellers, Jean-Philippe Zermati à notre droite et Jean-Michel Cohen à notre gauche, qui s’accordaient sur un seul point, confirmées par l’ensemble des études sur le sujet : tous les régimes marchent, puisqu’ils font perdre du poids, mais aucun régime ne marche, puisque ce poids perdu, on finit toujours par le reprendre. Pour le reste, c’était « ah que je suis pas d’accord » à toutes les phrases. Nous avions d’un côté le discours lénifiant du tout à fait respectable Docteur Zermati, prônant la fin des régimes et des injonctions absurdes genre « mangez 5 fruits et légume par jour » ; d’après lui, il faut manger quand on a faim en donnant au corps ce qu’il réclame et ce dont il a besoin. Sans blague ? Il croît qu’on sait pas que c’est ce qu’il faudrait faire et que si on savait le faire, on n’aurait jamais commencé à faire des régimes ? Hélas, si nous autres femmes tendons à manger trop, trop gras, trop sucré, ce n’est pas par faim, mais par pulsion, par envie, par ennui, par stress, par désespérance, par frustration, par compensation… Bref, ce qui nous fait manger, ce n’est pas la faim, mais les émotions. Et des émotions, nous aurons toujours. La tentation restera d’autant plus présente que, à l’inverse de toute autre addiction, on ne peut pas ne pas manger. Il ne s’agit pas de renoncer à la bouffe comme on renonce à l’alcool, en sachant qu’un seul verre peut nous faire replonger. Non, nous on met tous les jours le doigt dans l’engrenage et on doit résister de toute nos forces pour ne pas se laisser entraîner. C’est peut-être pourquoi Weight Watchers marche si bien, c’est ce qu’on nous propose de plus proche des réunions d’Alcooliques Anonymes. WW c’est notre AAA à nous, réunissant les Amateurs d’Agapes Anonymes venus puiser ici « la sérénité d’accepter les choses que je ne peux changer, le courage de changer les choses que je peux, et la sagesse d’en connaître la différence ». Croire qu’on deviendra une femme raisonnable, qui mangera raisonnablement, en ingurgitant ce qui est nécessaire et suffisant pour répondre à ses besoins naturels, relève à mon sens de l’utopie. On peut juste apprendre à aller dans le bon sens car trouver son équilibre intérieur – qui entraînera l’équilibre dans son assiette et l’équilibre sur la balance – est le travail d’une vie. Et en ce sens, je rejoins complètement le constat du Docteur Cohen : On sera toujours plus ou moins au régime. Quand on lutte avec son poids, c’est pour la vie, ça demande une vigilance constante, il faudra toujours « faire attention ». On fera des régimes, on perdra du poids, on arrivera peut-être même à garder sa ligne un certain temps et puis, tôt ou tard, il y aura une fête, une tentation, un coup de blues de trop, un noël trop copieux, un chagrin d’amour, un nouveau job, un déménagement, une déprime saisonnière qui nous feront « craquer », et ce sera rebelote. Pas question pour autant de lâcher l’affaire, car on sait bien que notre self-estime et notre bien-être partiraient avec l’eau du bain. Et puis quand on entend la filiforme Ophélie Winter, belle plante à la silhouette inaccessible entourant nos deux éminents spécialistes, nous exposer son ascétique régime protéiné on se dit que finalement, ce n’est pas plus mal d’être dans le clan des femmes normales, éternellement au régime, plutôt que dans celui des brindilles capables de se planquer derrière un réverbère. Si le prix à payer pour me débarrasser de mes bourrelets c’est de manger du poulet tous les matins, je préfère encore les garder !